Les ambassadeurs de l’Union se sont réunis mercredi en fin d’après-midi pour évoquer la demande de report que Boris Johnson a finalement formulée par écrit, sans la demander ! Ils acceptent sur le principe d’accorder au Royaume-Uni une extension du délai qui permettrait d’éviter un « no deal ». Mais il est urgent de ne pas se presser, l’affaire évoluant de jour en jour. Les positions sont d’ailleurs relativement différentes sur la durée, quelques jours, ou quelques semaines, et les conditions requises, face à d’interminables rebondissements qui deviennent parfois grotesques.
La décision devra recueillir l’unanimité des Vingt-Sept. Or, de nombreux États membres redoutent le départ du Royaume-Uni. L’Allemagne, notamment, est prête à accorder un délai long et sans conditions, mais ne bloquera pas la décision qui sera prise. C’est la France qui a la position la plus dure, mais elle est assez isolée. Le président du Conseil européen en proposant de trancher la question par « une procédure écrite », sans passer par un sommet européen, a commis une boulette.
Hier, jeudi 24 octobre, Boris Johnson a changé de tactique et décidé, pour sortir de l’impasse dans laquelle il se trouve, de renoncer à une sortie le 31 octobre. Il opte pour le chantage. « Vous voulez du temps pour examiner mon « excellent » accord avec Bruxelles dans le détail. C’est d’accord, mais dans ce cas, je convoque des élections générales le 12 décembre. » C’est du chantage, mais, à ses yeux, c’est un chantage « raisonnable ».
Seulement voilà, la loi, le « Fixed-term Parliaments Act » de 2011, impose une majorité qualifiée des deux tiers à la Chambre des communes pour pouvoir convoquer une élection législative anticipée. M. Johnson a donc besoin des voix d’un certain nombre de travaillistes, pour recueillir cette majorité. Pour l’instant, la réponse de Jeremy Corbyn est ambigüe : « Attendons la décision des Européens » !
Boris Johnson et son conseiller politique, Dominic Cummings, sont convaincus que seule une nouvelle majorité absolue, permettra de sortir par le haut de cette situation.
Corbyn hésite. Son parti est divisé. Le risque est grand pour les travaillistes. Jeremy Corbyn donne l’impression de ne pas savoir ce qu’il veut : de nouvelles élections, un deuxième référendum, le « remain », le Brexit ? Trop de sujets suscitent l’inquiétude des députés. L’accord conclu avec les Européens est lourd de conséquences sur le plan économique et la rupture du Royaume-Uni avec les règles et normes européennes. Le protocole qui prévoit que l’Irlande du Nord reste dans le territoire douanier britannique, mais dans les faits continue à faire partie du marché intérieur européen pour les biens, comporte de sérieux risques d’instabilité en Irlande du Nord.
Le Royaume-Uni ou l’art de gérer ses contradictions !
Est-ce la peur du vide, la peur du lendemain, qui paralyse pareillement cette grande démocratie, qui conduit à voter un accord, mais pas sa mise en œuvre, à promettre ce qui ne pourra pas être tenu, à tenter en permanence de concilier l’inconciliable ?
Le Parlement, à coups d’amendements, peut parfaitement détricoter l’accord si des élections ne peuvent être convoquées.
Boris Johnson avait dit qu’il préférait « mourir dans un fossé » plutôt que d’accepter un report au-delà du 31 octobre. Il n’est pas mort ; il a simplement avalé son chapeau !
L’opinion publique britannique n’en peut plus. Elle veut en finir, de préférence avec un deal. Il est assez probable que le Royaume-Uni finira par quitter l’Union européenne dans les conditions prévues par l’accord négocié par Boris Johnson. C’est peut-être ce qui va sauver Boris Johnson après avoir perdu Theresa May
Le Royaume-Uni n’est plus une puissance mondiale, mais il a trouvé le moyen de faire parler de lui, comme s’il l’était encore…
Wait and see !
Laisser un commentaire