A Paimpol, la vie a bien changé depuis l’époque des « Pécheurs d’Islande » qui inspirèrent Pierre Loti. Le tourisme et la plaisance, surtout au mois d’août, l’emportent aujourd’hui sur la pêche. La ville, très bien restaurée, a beaucoup de charme. Les belles demeures du XVIe siècle de la Place du Martray retiennent à juste titre l’attention. Les galeries de peinture aussi, il y en a pour tous les goûts ! Depuis que j’ai lu « Composition française », l’excellent livre dans lequel Mona Ozouf raconte son enfance à Plouha, j’évite de parler de Théodore-Botrel, l’auteur de « La Paimpolaise ». « Et vous, Mademoiselle, aimez-vous Botrel ? avait demandé le père de Mona Ozouf à sa future épouse ? Botrel, écrit Mona Ozouf, chouan bêta, était alors dans le mouvement breton l’objet d’une aversion bien partagée (…) Mais ma mère n’avait jamais lu les charges furieuses contre les « botrelleries » et je ne sais qui lui a soufflé une réponse négative (…) J’espère toujours obscurément que mon existence n’a pas seulement tenu à cette allergie à Botrel. » Elle est encore plus sévère, quelques lignes après !
Au sud de Paimpol, nos amis tenaient beaucoup à nous montrer le « temple de Lanleff ». C’est un curieux monument récemment restauré par un artisan de grand talent (Alain Le Boulzec à Pommerit la Vicomté). L’édifice, à l’origine longtemps mystérieuse, est en grès rose, de style roman primitif, construit, probablement au XIe siècle. Mystérieuse, car certains affirmaient que c’était un temple gallo-romain, d’autres un baptistère mérovingien. C’est en fait une ancienne église bâtie sur un plan circulaire à la façon de celle du Saint Sépulcre de Jérusalem. Elle comporte une double enceinte de murailles solidement construits, séparée par un déambulatoire. A proximité, il y a une fontaine dont la légende est liée au temple de Lanleff. Une pauvre et affreuse femme fit un jour un troc avec le diable : son enfant en échange de pièces d’or. Le diable conclut l’affaire et déposa une poignée de pièces sur la margelle de la fontaine. Il saisit alors l’enfant et l’emporta. Quant la mère indigne voulut récupérer les pièces, elle se brûla. Les pièces sortaient tout juste des flammes de l’enfer.
Dans un cri de douleur, elle lâcha l’or si convoité et les pièces s’incrustèrent à tout jamais dans le granit de la margelle. Si vous passez par Lanleff, rendez-vous à la fontaine. Vous mouillerez la margelle et 14 pièces apparaîtront. Mais réfléchissez bien avant de les saisir et de les empocher…
Au large de Paimpol, EDF a récemment immergé à titre expérimental sa première hydrolienne – la première au monde – par 35 mètres de fond. Les quatre turbines sous-marines alimentées par la marée qui fourniront du courant à 3000 foyers ont été mises à la mer dans la baie de Launay, près du parking de la plage. Chaque turbine, de 16 mètres de diamètre et d’un poids de 700 tonnes, ressemble au rotor géant d’un moteur d’avion. La source d’énergie, propre, renouvelable, de ces éoliennes sous-marines sera fournie par les courants de marée, comme pour l’usine marémotrice de la Rance. EDF évalue prévisionnelle ment la puissance moyenne à 500 kilowatts par turbine tout au long de l’année, en fonction des coefficients de marée.
Si l’expérience se révèle concluante, c’est une filière industrielle des hydroliennes qu’EDF a l’intention de créer.
Un mot enfin, puisque c’est le thème de cette série d’articles, sur la libération de Paimpol qui fut la dernière ville des Côtes-du-Nord a être libérée. Ceinturé de champs de mines et de pièges de toutes sortes, la ville, avec Lézardrieux, Plounez, était un important point d’appui du dispositif allemand. Il fallut quatre jours à la Task-Force A du général Earnest pour venir à bout de la poche de Tréguier-Lézardrieux-Paimpol. L’intervention aérienne de chasseurs-bombadiers pour pilonner la presqu’île de Guilben, et Plounez fut déterminante. Dans la soirée du 15 août, les Alliés, avec l’aide très efficace de la Résistance, lancèrent une attaque contre Paimpol et dégagèrent la ville aux environs de midi le 17 août 1944. Plus de 2.000 soldats allemands furent faits prisonniers
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