L’été 24 –  « On est chez les fous »


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La 17e législature doit débuter le jeudi 18 juillet. Pour la première fois depuis longtemps l’Assemblée devra assumer le rôle que lui assigne la Constitution. Le 19 juillet, au bout de trois tours de scrutin et dans la confusion, Madame Yaël Braun-Pivet est réélue présidente de l’Assemblée nationale, comme si rien ne s’était passé ! Son élection n’a été rendue possible que par un accord négocié avec la droite républicaine. La preuve qu’ensemble, ils peuvent constituer une majorité. Le Rassemblement national, premier parti en nombre de députés et en voix, est exclu des principaux postes de l’Assemblée.

Trente-neuf jours après la dissolution de l’Assemblée nationale, onze jours après le second tour des législatives qui a vu la défaite du camp présidentiel, Emmanuel Macron est toujours à l’Élysée, Gabriel Attal est toujours à Matignon, et Yaël Braun-Pivet est toujours au perchoir. Les Français n’y comprennent plus rien ! « Après tout, c’est leur faute ! » entend-on, souvent. Ils n’arrivent pas à gérer leurs contradictions. Pour battre le Rassemblement national, ils ont voté pour des politiques qu’ils ne veulent pas au pouvoir !

Ce n’est plus l’esprit de la Ve République. Le chef de l’État ne dirige plus le pays. Nous sommes passés d’un régime semi-présidentiel à un régime semi-parlementaire. C’est le retour du régime des partis, aujourd’hui moribonds, que le général de Gaulle avait tout fait pour éviter.

Emmanuel Macron, qui n’avait pas parlé aux Français depuis le 7 juillet, est sorti de son silence. Il demande aux forces politiques « républicaines » « d’engager un dialogue sincère et loyal pour bâtir une majorité solide, nécessairement plurielle, pour le pays », dans une lettre aux Français publiée mercredi par les journaux de la presse quotidienne régionale.

L’air du temps est à la révolution. Le mot est à la mode. Révolution était le titre du livre de Macron, La gauche unie, pour avoir le plus grand nombre de députés, tient un discours révolutionnaire et fait dans le burlesque pour trouver un candidat pour Matignon. La droite de la droite appelle à une Révolution nationale.

Au Nouveau Front populaire, les désaccords stratégiques sont étalés au grand jour. L’alliance est purement électorale. Les formations de gauche se révèlent incapables de présenter un candidat au poste de Premier ministre. Tour à tour, Huguette Bello, présidente de la région La Réunion, proposée par les communistes et les Insoumis et la diplomate Laurence Tubiana, renoncent. Laurent Wauquiez, nouveau président du groupeLa Droite républicaine à l’Assemblée nationale, se déclare ouvert à un « pacte législatif » avecceux qui soutiennent encore le Président. Ce qui était impossible, serait devenu possible. Comprenne qui pourra !

Un sondage Odoxa pour Le Figaro révèle un très fort rejet des partis politiques. 82 % des Français ont une opinion négative de ces derniers ; 25 % ont même une très mauvaise opinion. Les membres du gouvernement peuvent à la fois rester en fonction et voter à l’Assemblée. Ils ont vu les députés RN privés de tout poste de responsabilité, alors qu’ils représentent 32 % des électeurs inscrits, c’est-à-dire beaucoup plus que les représentants du NPF et ceux de l’ancienne majorité. C’est incompréhensible ! Des sujets qui préoccupent les Français : la sécurité, l’immigration, l’éducation, la santé, les services publics, le pouvoir d’achat, le redressement financier, il n’est pas question.

Pendant ce temps, face à une Espagne très supérieure, l’équipe de France de football a été éliminée en demi-finale de l’Euro (2-1) mardi soir. Heureusement, le premier vol d’Ariane 6 s’est bien passé, qui relance l’Europe spatiale.

Une coalition à l’allemande, englobant socialistes, écologistes, soutiens de Macron et républicains modérés permettrait d’atteindre la majorité à l’Assemblée nationale. C’est ce que souhaiteraient 61 % des Français qui estiment indispensable « que différentes formations politiques s’allient afin de constituer une majorité au sein de l’Assemblée nationale pour pouvoir gouverner le pays », selon une enquête d’Harris interactive pour M6 et RTL.

Pour la première fois depuis 1905, l’arrivée du Tour de France n’a pas lieu cette année à Paris, sur les Champs-Élysées, en raison des Jeux olympiques, mais à Nice, à l’issue d’un contre-la-montre individuel de 34 kilomètres entre Monaco et Nice qui clôture, le 21 juillet, la 111ᵉ édition de la Grande Boucle.

À cinq jours de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques, prévue le vendredi 26 juillet, le centre de Paris, est devenu Fort Knox ! Plus de quarante mille barrières ont été disposées dans les rues de Paris. Des périmètres de sécurité interdisant tout accès à la Seine non justifié par un QR code, ont été établis. Ce sont des centaines de patrouilles de policiers et de gendarmes, des stations de métro fermées. Des systèmes de vidéosurveillance algorithmique ont été installés. Paris ressemble à Pékin. Nombre de commerçants et de restaurateurs parisiens ne décolèrent pas.

Le chef de l’État demande une « trêve politique » pendant les Jeux olympiques et renvoie la nomination d’un Premier ministre à la mi-août au plus tôt. Dans une interview à France 2 et franceinfo, le 23 juillet, il reconnaît enfin qu’il a perdu les élections. « Aucun parti ne peut appliquer son programme, ni le NFP, ni la majorité présidentielle ni la droite républicaine. Il va falloir savoir faire des compromis ».

Une heure avant cette interview, le Nouveau Front populaire annonce la désignation de Lucie Castets pour le poste de Premier ministre. C’est une inconnue. La directrice des finances et des achats de la Ville de Paris, haute fonctionnaire, passée par Sciences Po, la London School of Economics et l’ENA, n’a jamais été élue. L’annonce est déconcertante. Interrogé sur ce sujet, Emmanuel Macron s’est contenté d’écarter le nom de la candidate unique du NFP au poste de Première ministre, estimant que « le sujet n’est pas là ». Le Président considère que c’est aux partis qui ont participé au front républicain contre le RN, au second tour des législatives, de s’entendre pour constituer une coalition et nouer des « compromis ».

« On est chez les fous » ! Avait dit le Président à la fin de la réunion du G7. Pour le sociologue Jean-Pierre Le Goff, tout se « déglingue ».


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