Jérôme aimait les belles montres, les chemises Façonnable, les séjours au Club Méditerranée, les installations du Racing Club de France, au Pré Catelan, où il jouait au tennis ou au volley. Il aimait la fête, les réunions entre amis. Il aimait la vie.
Les longues heures de solitude, entre les quatre murs de sa chambre, n’en ont été que plus éprouvantes. Elles ne se traduisaient par aucun signe d’amertume ou de révolte. Le beau sourire qu’il nous adressait chaque jour, quand nous entrions dans sa chambre, était notre récompense.
Jérôme nous a souvent demandé de lui lire, et relire, la fin de Cyrano de Bergerac, dans laquelle il devait puiser une forme de courage à laquelle il s’identifiait.
Ainsi était Jérôme !
Quand il n’eut plus de doute sur la nature de sa maladie, à la fin du mois de décembre 1992, il se rendit à la bibliothèque de l’hôpital Cochin et là, pendant plusieurs heures, il comprit ce qui l’attendait. La sclérose en plaques est une maladie neurologique qui détruit petit à petit la myéline qui entoure les ramifications nerveuses et paralyse les organes les uns après les autres.
Interrogé pour le 20h de TF1, en 1998, sur cette mystérieuse maladie, il déclara, avec un sourire résigné : « Je sais que je ne pourrai pas faire demain, ce que je fais aujourd’hui » Il adapta alors ses passions à ses moyens. L’informatique, pour lequel il montra un certain talent, devint le centre de ses occupations. Créer des sites internet, dompter les logiciels les plus compliqués, réaliser des images de synthèse, s’équiper des ordinateurs les plus puissants : « des bêtes de course », disait-il, caractérisèrent sa nouvelle vie.
Un syndrome cérébelleux le priva rapidement de toute autonomie. Nous devînmes alors ses mains et ses yeux. Quand nous ne comprenions pas ce qu’il voulait que nous fassions, il s’impatientait. Le mot de passe qu’il utilisait était toujours : « griffon », inspiré de l’étrange et intrigante correspondance entre Sabine et Griffon de Nick Bantock, qu’il avait appréciée.
Quand il perdit définitivement l’usage de la parole, au service de réanimation de l’hôpital Raymond Poincaré à Garches, en décembre 2006, il n’en conserva pas moins un humour très personnel. Alors que nous lui demandions ce que nous pouvions faire pour lui, il nous répondit, en posant un doigt sur les lettres de l’alphabet : « un café et l’addition », heureux de l’effet produit.
Ainsi était Jérôme.
Sa force de caractère était surprenante. Il ne se plaignait jamais et niait systématiquement les effets de cette terrible maladie. Nous ne l’avons jamais entendu dire qu’il souffrait ou qu’il en avait assez. Il avait le souci constant de ne pas nous faire de peine. Sa volonté de vivre, alors que les perfusions et autres sondes de toutes sortes le maintenaient en vie, est restée intacte jusqu’au dernier moment.
Grand séducteur, il manifesta encore, dimanche après midi, en voyant entrer dans sa chambre une nouvelle et charmante aide-soignante, à quel point il était sensible « aux robes qui passèrent dans sa vie. »
Ainsi était Jérôme, que nous aimions tant et qui nous le rendait bien.
Dany, Laure et Michel
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