« Je félicite toutes celles et ceux qui avaient prévu tous les éléments de la crise, une fois qu’elle a eu lieu. Les commentateurs en sont pleins ». Agacé, le chef de l’État a laissé éclater sa colère en introduction de la réunion de la cellule interministérielle de crise, suivie d’un conseil de défense consacré au coronavirus, qui s’est tenu ce matin dans le sous-sol du ministère de l’Intérieur.
Agacé, je le suis également un peu plus chaque jour. Ceux qui exercent, ou ont exercé des responsabilités, savent ce qu’est la gestion de crise. Ils s’expriment avec prudence, avec nuance, avec mesure, avec humilité. Face à chaque décision, qui peut paraître contradictoire, ils pèsent le pour et le contre, habitués aux arbitrages. Les autres, qui n’ont jamais dirigé qu’eux-mêmes, et encore, souvent mal, critiquent, affirment, au risque de se contredire d’un jour à l’autre, insultent, non sans arrières pensés.
Emmanuel Macron dit vrai quand il rappelle que « La France s’est mobilisée et a activé ses dispositifs d’alerte avant même que l’OMS (Organisation mondiale de la santé) ne sonne le tocsin ». Il a raison de déplorer que « trop » de Français continuent à « prendre à la légère » les consignes de confinement prises pour lutter contre l’épidémie de coronavirus, qui « ne sont pas parfaitement respectées ». Olivier Véran aussi quand il dit que « le confinement est nécessaire. C’est une étape difficile qui demande du temps. Mais plus on l’applique avec sérieux, moins il durera. »
Il n’en reste pas moins que des erreurs, il y en a eu, c’est évident. Gouverner, c’est prévoir et c’est anticiper. C’est sans doute ce qui a le plus manqué dans cette période. L’exécutif a trop souvent tardé à prendre les mesures les plus efficaces, le dépistage a été insuffisant, le confinement tardif, les masques en rupture de stock, de même que la solution hydroalcoolique. Il y aura des enseignements à tirer. Cette grave épidémie constitue un exercice de protection civile à grande échelle qu’il faudra étudier avec beaucoup de soin. Le gouvernement a sa part de responsabilité, qu’il assume d’ailleurs courageusement, mais l’OMS aussi, qui a beaucoup tardé à prendre des décisions. De là à dire, pour paraphraser Clémenceau, qu’une pandémie est une chose trop sérieuse pour la confier à des scientifiques, il n’y a qu’un pas. Un pas que franchit Anne Claude Crémieux, professeur en infectiologie à l’hôpital Saint-Louis, à Paris, auteure, notamment, du livre intitulé « Gouverner l’imprévisible » (Pandémie grippale, SRAS, crises sanitaires), quand elle dit que « les bons politiques sont ceux qui n’écoutent pas aveuglément des scientifiques », sur le plateau de l’excellente émission C dans l’air (France 5).
Pour l’instant on a seulement évité la panique !
Dans son édition du 21 mars, le journal Le Monde restitue, à sa façon, les vingt jours où tout a basculé au sommet de l’État, sous forme de chronique journalière destinée à souligner qu’il « aura fallu plusieurs semaines et un arbitrage entre les enjeux sanitaires, économiques et politiques pour que la lutte contre le coronavirus exige d’isoler les Français. »
Depuis plusieurs jours, j’éprouvais, moi aussi, le besoin de remonter le temps pour comprendre avant de juger. La vérité, rien que la vérité ! J’ai consulté les archives du journal Le Monde, une mine pour les chercheurs, en tapant simplement « coronavirus » sur le moteur de recherche. Cent jours, à peu près, se sont écoulés depuis que l’OMS a officiellement été informée le 31 décembre, par les autorités chinoises, de cas de pneumonies d’une origine inconnue dans la ville de Wuhan, où vivent 11 millions de personnes. Un lien semblait exister à Wuhan entre ces cas et un grand marché aux poissons et produits de la mer, mais où se vendent également d’autres animaux : volailles, faisans, viandes d’animaux sauvages (chauves-souris, marmottes…). Plusieurs des malades y travaillent ou l’ont visité avant l’apparition de leurs symptômes. L’agent infectieux impliqué dans l’épidémie de Wuhan n’est pas un virus grippal. Il n’appartient pas non plus à la famille des adénovirus, responsables de pharyngites, de pneumonies mais aussi de conjonctivites. L’affection se manifeste par une fièvre accompagnée de difficultés respiratoires.
9 janvier « Une pneumonie d’origine inconnue en Chine »
Les journalistes du Monde, Paul Benkimoun et Frédéric Lemaître (Correspondant à Pékin), racontent que les États voisins avaient rapidement mis en place dans les aéroports des procédures de détection de fièvres chez des passagers arrivant de Wuhan. L’OMS en restait à la recommandation de mesures générales de surveillance vis-à-vis de la grippe et du SRAS et déconseillait aux États d’imposer des restrictions sur les voyages et le commerce avec la Chine, en raison de lourdes conséquences notamment économiques, pour une efficacité relative.
Sur les réseaux sociaux, rares sont ceux qui osent critiquer les autorités, même si certains reconnaissent avoir peur d’attraper cette maladie. Le 1er janvier, la police de Wuhan a arrêté, en ne manquant pas de le faire savoir, huit personnes qui avaient comparé l’épidémie actuelle à celle du SRAS. Alors que des centaines de millions de Chinois s’apprêtent à voyager dans tout le pays à l’occasion du Nouvel An chinois qui tombe cette année le 24 janvier, une épidémie qui se transmettrait entre humains serait extrêmement difficile à gérer.
La chaîne publique chinoise CCTV apprenait qu’une équipe de médecins chinois avait réussi à déterminer toute la séquence génomique du nouveau virus apparu chez un malade. Ce virus présentait « une morphologie de type coronavirus », caractérisée par une forme de couronne visible au microscope électronique. On ne connaît toutefois ni son origine, ni sa durée d’incubation, ni le mode de transmission. Au 3 janvier, le nombre de malades notifié à l’OMS s’élevait à 44, dont 11 atteints d’une forme sévère de la maladie.
Un lien semble exister à Wuhan entre ces cas et un grand marché aux poissons et produits de la mer, mais où se vendent également d’autres animaux : volailles, faisans, viandes d’animaux sauvages (chauves-souris, marmottes…). Plusieurs des malades y travaillent ou l’ont visité avant l’apparition de leurs symptômes.
L’agent infectieux impliqué dans l’épidémie de Wuhan n’est pas un virus grippal. Il n’appartient pas non plus à la famille des adénovirus, responsables de pharyngites, de pneumonies mais aussi de conjonctivites.
16 janvier
Le Figaro consacre quelques lignes à une mystérieuse pneumonie en Chine où un homme de 69 ans est mort à Wuhan.
18 janvier « L’épidémie de pneumonie en Chine pourrait déjà avoir contaminé plus d’un millier de personnes ».
Neuf jours se sont écoulés avant qu’un nouvel article mentionne que « L’épidémie de pneumonie en Chine pourrait déjà avoir contaminé plus d’un millier de personnes » et précise que « des scientifiques d’un centre de recherche de l’Imperial College de Londres, qui conseille l’Organisation mondiale de la santé (OMS), pensent que le chiffre pourrait être bien plus élevé […] Le virus suscite des inquiétudes croissantes après la mort, mercredi en Chine, d’un deuxième patient, un homme de 69 ans tombé malade le 31 décembre et qui a vu son état de santé s’aggraver cinq jours plus tard. Malgré tout, les autorités sanitaires locales se sont voulues rassurantes cette semaine. Selon elles, le risque d’une transmission du virus entre humains, s’il n’est « pas exclu », est jugé « faible ».
19 janvier – Courrier international mentionne ce que publie le South China Morning Post au sujet d’un nouveau type de pneumonie qui a déjà fait deux morts dans la ville de Wuhan, en Chine centrale. Si le 2019-nCov – nom scientifique de cette nouvelle souche – n’a fait encore fait que deux morts, il appartient à la famille du tristement célèbre Sras, “qui avait tué près de 800 personnes sur les 8 000 infectées en 2002”, rappelle The Guardian. Selon CNN, le virus serait même déjà présent dans plusieurs pays voisins. Plusieurs pays ont commencé à prendre des mesures de prévention. “La Chine n’a pas annoncé de restrictions dans les transports, mais les autorités de Hong Kong ont déjà mis en place des mesures de dépistage, notamment des contrôles stricts de température pour les voyageurs en provenance de Chine continentale”, rapporte le Bangkok Post. Aux États-Unis, tous les passagers en provenance de Wuhan sont contrôlés depuis ce week-end dans les aéroports de New York, San Francisco et Los Angeles. À leur arrivée, les voyageurs “devront répondre à des questions sur d’éventuels symptômes respiratoires et leur température sera prise”, précise le Los Angeles Times.
21 janvier « Le coronavirus cousin du SRAS réveille de vieilles méfiances en Chine »
Dans son article, Frédéric Lemaître écrit qu’il a fallu « attendre le lundi 20 janvier pour que les autorités reconnaissent que plusieurs cas ont été identifiés dans d’autres villes que Wuhan, notamment à Shenzhen, dans le Sud, et à Pékin, dans le Nord. Environ 200 cas sont alors recensés dans le pays.
22 janvier « Face au nouveau virus en Chine, « l’essentiel reste la prévention et la sensibilisation du public »
Aude Lasjaunias rapporte, dans son journal, les propos du virologue Jean-Paul Gonzalez, professeur associé au sein du département d’immunologie et de microbiologie de l’université de Georgetown, à Washington DC, aux États-Unis. À la question : « Que sait-on du coronavirus apparu à la mi-décembre 2019 dans le centre de la Chine ? », il avait répondu : « Pour l’instant, il subsiste de nombreuses zones d’ombre. On sait que le virus a été repéré en décembre 2019 sur des personnes travaillant dans un marché aux poissons à Wuhan. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime qu’un animal serait la source primaire la plus vraisemblable de l’épidémie, mais nous n’avons pas encore identifié lequel. On sait également, depuis le début de la semaine, qu’il existe au moins un cas de transmission interhumaine. Mais on en ignore encore les modalités. La contamination s’est-elle faite par la toux ? Par un contact avec des mains sales ? Dans une situation comme celle-ci, tout l’enjeu est de trouver le « cas index » [ou « patient zéro »], c’est-à-dire la première personne infectée, puis de déterminer comment celle-ci a été contaminée. Ensuite, il faut identifier le deuxième cas et établir, là encore, la méthode de contamination : est-ce la même source ?
A la question : « Que peut-on faire d’autre face à ce type de virus ? », il répondait : « Il n’existe ni traitement vaccinal ni traitement thérapeutique pour les coronavirus. En revanche, on a pu observer pendant l’épidémie de SRAS en 2003 que les barrières infirmières, du type port de masque respiratoires, sont très efficaces.
On a été un peu injustes avec les Chinois à l’époque. Ils ont mal identifié le virus dans un premier temps – ils avaient isolé un contaminant du SRAS –, mais il s’agit d’une erreur de bonne foi, pas d’une volonté de tromper la communauté scientifique internationale. C’était la première fois qu’un virus de cette nature apparaissait dans le pays, les autorités n’avaient aucune idée de ce à quoi elles faisaient face.
Enfin, à la question : « Dans un contexte de mondialisation, risquons-nous d’être de plus en plus fréquemment confrontés à des pandémies ? », il avait répondu : « Assurément. Notre époque est marquée par une plus grande mobilité des humains. Mais pas seulement. Les virus voyagent aussi avec les moustiques, la nourriture ou les animaux.
Le même jour, sous le titre : « La menace du coronavirus de Wuhan plane sur le Nouvel An chinois », Le Monde informe que depuis le signalement, le 30 décembre 2019, de plusieurs cas de pneumonies dans la ville chinoise de Wuhan (province de Hubei), associés à un grand marché où sont vendus des animaux vivants, marins et terrestres, l’agent infectieux a été identifié. Il s’agit d’un nouveau virus de type coronavirus, baptisé « 2019-nCoV ». Transmis de l’animal à l’homme, il a depuis acquis une capacité de transmission interhumaine, comme l’illustre la quinzaine de soignants infectés par des patients.
Le nombre de cas a connu une forte accélération. De 44 cas dans la ville de Wuhan, le 10 janvier, le virus s’est propagé tant en Chine qu’à l’étranger par le biais de voyageurs en provenance de Wuhan. Mardi 21 janvier, le bilan, qui évolue très vite, s’établissait officiellement à 440 cas confirmés, dont neuf mortels dans plusieurs villes et provinces chinoises (Hubei, Guandong, Pékin, Shanghaï, Hongkong). Un bilan très vraisemblablement en dessous de la réalité.
Au moins cinq pays – Thaïlande, Japon, Corée du Sud, Taïwan et États-Unis – ont signalé des cas importés. L’identification du virus émergent et le partage par la Chine de sa séquence génomique, le 12 janvier, permettent aux scientifiques de mettre au point des tests de diagnostics. A plus long terme, cela rend possible de travailler sur un vaccin, à partir de ceux en cours de développement pour d’autres virus membres de la même famille : ceux responsables du SRAS (SARS-CoV) et du syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS-CoV).
23 janvier « Trois villes chinoises mises en quarantaine pour « stopper la diffusion du virus ».
On pouvait lire dans Le Monde que la ville de Wuhan, épicentre d’un début d’épidémie de pneumonie à coronavirus a été mise en quarantaine, jeudi 23 janvier. Une décision similaire a été prise à Huanggang, cité de 7,5 millions d’habitants, et à Ezhou, toutes deux situées à 70 km à l’est de Wuhan.
Tous les transports publics (trains, avions, bus et métros) ont été suspendus, et les autoroutes menant à ces cités, coupées. Les habitants ne peuvent plus sortir de la ville « sans autorisation spéciale » ni s’y rendre. Pékin a annoncé l’annulation des festivités du Nouvel An chinois dans la capitale. La Cité interdite, monument historique le plus célèbre de Chine, fermera par ailleurs ses portes à compter de samedi « afin d’éviter des contaminations liées au rassemblement de visiteurs », a annoncé le musée dans un communiqué.
Le nouveau coronavirus (baptisé « 2019-nCoV ») a déjà fait dix-sept victimes et 570 personnes sont infectées en Chine, d’après le dernier décompte officiel. Mais une étude de l’Imperial College de Londres estime que le nombre de cas à travers le pays pourrait aujourd’hui atteindre 4 000.
« Ces mesures fortes vont non seulement contrôler l’épidémie dans leur pays, mais aussi minimiser les risques de diffusion de l’épidémie dans le monde », a commenté mercredi Tedros Adhanom Ghebreyesus, le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui n’avait pas encore déclaré une situation « d’urgence de santé publique de portée internationale », faute d’informations suffisantes.
Dans la ville, beaucoup d’habitants sont en colère contre la réaction tardive des autorités. Il y a moins d’une semaine, samedi 18 janvier, un banquet géant rassemblant 40 000 familles a eu lieu dans le centre-ville. Objectif : battre le record du monde du nombre de plats servis pour un événement.
De très nombreux internautes accusaient l’administration d’avoir réagi trop lentement. Le nombre officiel de cas était encore limité à une quarantaine et la transmission de personne à personne n’avait pas encore été établie, alors que, d’après des médias chinois, les hôpitaux de la ville étaient déjà débordés.
À cette date, 24 autres provinces chinoises avaient déclaré des cas, ainsi que Macao et Hong Kong.
Le même jour, le journal rapportait que, « réunie en urgence mercredi 22 janvier, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a décidé de se donner vingt-quatre heures supplémentaires pour décider si l’épidémie de pneumonie à coronavirus 2019-nCoV constitue une urgence de santé publique de portée internationale ».
24 janvier « Coronavirus : l’épidémie va peser sur l’économie chinoise ».
L’épidémie de coronavirus tombait au plus mauvais moment pour la Chine ? Le Nouvel An lunaire est la principale fête de l’année pour les Chinois, qui voyagent aux quatre coins du pays pour passer ce moment en famille. Simon Leplâtre, dans Le Monde, se fait l’écho des conséquences économique de l’épidémie : « Cette crise pourrait avoir un impact majeur sur la consommation des ménages. Pendant les six jours des vacances officielles du Nouvel An, ils avaient, en 2019, dépensé 1 010 milliards de yuans (132 milliards d’euros). Cette période est essentielle pour les secteurs de la restauration, du tourisme ou des loisirs : les salles de cinéma réalisent 10 % de leur chiffre d’affaires annuel durant cette semaine. Le parc d’attractions de Disneyland à Shanghai a annoncé vendredi qu’il resterait fermé jusqu’à nouvel ordre. »
Le même jour, l’OMS juge qu’il ne s’agit pas encore d’une menace globale, malgré les mises en quarantaine massives. Le Monde rapporte que « Wuhan est confrontée à une grave pénurie de matériel médical en ce moment. La ville a besoin de masques chirurgicaux de norme N95, de lunettes de protection, de vêtements de protection. Dans certains hôpitaux, le personnel ne dispose que d’un masque par jour, alors que ces derniers perdent leur efficacité après deux heures, selon les médias chinois. Les kits de diagnostic du virus sont aussi en nombre insuffisant dans les hôpitaux de la ville, dépassés par la demande. Les salles d’attente des hôpitaux deviennent des bouillons de culture où le virus peut être passé de patients atteints à ceux qui souffrent de simples rhumes ou de la grippe saisonnière. Mais, faute de moyens, nombre de patients présentant les signes du virus sont renvoyés chez eux sans diagnostic. Les masques sont désormais obligatoires dans les lieux publics, mais encore faut-il en trouver : pharmacies et supérettes ont été dévalisées dans tout le pays.
Si la transmission d’homme à homme a été établie dans le cercle familial restreint ou avec les personnels de santé, les cas repérés en dehors de Chine sont importés et ne signalent pas une propagation internationale du coronavirus. L’OMS s’en tient donc à des mesures classiques de dépistage dans les aéroports et ne recommande pas de restrictions de voyages ou de commerce.
Le comité chargé d’évaluer la dangerosité du virus et son risque de propagation, constitué de médecins, de virologues et d’épidémiologistes, s’est montré profondément divisé, mais a convenu que le faible nombre de cas notifiés en dehors de Chine et les mesures prises par Pékin ne justifiaient pas l’USPPI, même si « de nombreuses questions sur le virus » demeurent.
Le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a cependant appelé à la plus grande prudence. « Ne vous méprenez pas, l’épidémie est une urgence en Chine, même si ce n’est pas encore une menace mondiale. Mais elle pourrait le devenir. »
En France, le journal du soir fait état, le 24 janvier, d’un troisième cas d’infection. Mme Buzin, en conférence de presse, déclarait : « Nous avons aujourd’hui les premiers cas européens, probablement parce que nous avons mis au point le test très rapidement et que nous sommes capables de les identifier. Il faut traiter une épidémie comme on traite un incendie, très vite repérer la source » et la « circonscrire le plus vite possible ».
L’épidémie « s’accélère » et place la Chine dans « une situation grave », a reconnu samedi le président, Xi Jinping, qui appelle à renforcer l’autorité du régime communiste.
Les autorités chinoises cherchent à reprendre la main, notamment en restreignant les déplacements. Wuhan et pratiquement toute la province environnante du Hubei ont été ainsi coupées du monde, avec plus de 56 millions d’habitants confinés.
Des cas ont été détectés dans une douzaine de pays : plusieurs pays d’Asie (Corée du Sud, Japon, Népal, Singapour, Taïwan, Thaïlande, Vietnam, et dans les provinces semi-autonomes chinoises de Hongkong et Macao), mais aussi en Australie et aux États-Unis.
25 janvier « Isolement, traçage : des « mesures barrières » contre le coronavirus »
Dans un entretien au « Monde », Arnaud Fontanet, responsable de l’unité d’épidémiologie des maladies émergentes à l’Institut Pasteur, et professeur au Conservatoire national des arts et métiers, estimait que « les autorités chinoises faisaient face à une crise sanitaire très complexe ».
« Que faut-il faire ? » lui demande la journaliste. « Ce qui a fonctionné lors de la période critique du SRAS en avril 2003, c’était une combinaison de mesures restrictives. D’une part, demander aux gens de rester chez eux, fermer les lieux publics, par ailleurs déserts, et organiser la prise en charge la plus précoce possible des malades et leur mise à l’isolement. Il faut informer les populations afin que les personnes fébriles se déclarent et puissent, si nécessaire, être mises à l’isolement. D’autre part, y associer des mesures drastiques d’hygiène dans les hôpitaux, notamment le port de masques, le lavage des mains, le circuit des instruments, de la literie… Ce que l’on appelle des « mesures barrières ». Il faut arriver à faire en sorte que le dernier malade arrivé à l’hôpital n’ait infecté personne, que l’endroit puisse être déclaré « clean ». Ce travail est essentiel comme nous l’a appris l’expérience des Canadiens qui ont été confrontés en 2003 à une forte épidémie de SRAS à partir d’un hôpital à Toronto (Ontario). Il faut donc « stériliser » les hôpitaux et associer les mesures communautaires que nous avons évoquées.
Pas de contacts à moins d’un mètre, la distance d’un postillon. C’est un travail de traçage lourd à mettre en place. Pour une personne infectée, il peut y avoir plusieurs dizaines de cas contacts qu’il faut alors suivre pendant quatorze jours, la durée maximum d’incubation du virus. Ces personnes doivent rester chez elles, prendre leur température deux fois par jour et prévenir les services sanitaires si elles ont de la fièvre.
« Faut-il craindre une épidémie mondiale ? Qu’en est-il de la France ? », lui demande la journaliste. Réponse : « En France, le dispositif repose sur deux éléments. D’abord, l’information à destination des voyageurs qui reviennent de Chine. S’ils sont fiévreux, toussent ou ont des difficultés respiratoires, ils doivent appeler le 15. Là, le régulateur évaluera le risque. L’élément le plus important est de savoir si la personne revient de Chine ou a été en contact avec des personnes provenant de la zone infectée.
Ensuite, si nécessaire, il y a une prise en charge dans un des hôpitaux de référence habilités à recevoir des patients infectés par le MERS – le syndrome respiratoire du Moyen-Orient –, qui est toujours actif. Ils sont équipés pour mettre à l’isolement les patients, en attendant la confirmation du diagnostic et en assurant les soins si nécessaire.
Le même jour, Le Monde rapporte que deux articles de la revue britannique « The Lancet » confirment que le 2019-nCoV se transmet bien de personne à personne. Le bilan du nouveau coronavirus 2019-nCoV, responsable de l’épidémie de pneumonie partie de Wuhan (Chine), s’est fortement alourdi, samedi 25 janvier, à près de 1 300 personnes touchées et 41 morts, tous en Chine pour ces derniers. Des cas ont été détectés ces derniers jours dans une douzaine de pays, du Japon à la France en passant par l’Australie et les États-Unis.
26 janvier « Coronavirus : les masques de protection en rupture de stock dans certaines pharmacies françaises »
Le Monde consacre un article à la rupture de stock de masques de protection dans certaines pharmacies françaises, depuis l’annonce de la propagation de l’infection au coronavirus en Chine. Aux Etats-Unis aussi, les hôpitaux manquaient de masques, blouses, pour protéger leur personnel du coronavirus.
27 janvier « En Chine, l’inquiétude vire à la psychose face à la propagation du coronavirus ».
Sous le titre, Simon Leplâtre raconte qu’à Wuhan « le temps d’un week-end, le bilan est passé de 688 cas pour 15 décès à près de 2 800 cas pour 80 décès. 5 millions d’habitants étaient partis, emportant potentiellement avec eux le virus aux quatre coins de la Chine et du monde. »
Voilà ce que nous savions au 27 janvier. Au lendemain des fêtes de fin d’année, la menace occupait bien peu de place dans les médias. Personne ne posait à l’exécutif la question de savoir si la France disposait d’un stock de masques suffisant, d’un nombre de tests, qui n’existait pas encore, en grande quantité, de mesures à prendre en cas de pandémie. Ceux qui gesticulent aujourd’hui s’exprimaient sur le risque de guerre en Iran, l’évasion de l’ex-PDG de Renault-Nissan, avaient des choses à dire sur le prince Harry et son épouse Meghan, les nouvelles journées de manifestations, le ras-le-bol des usagers et commerçants, l’accumulation d’erreurs et de maladresses sur le projet de réforme des retraites, mais le virus, dont on ne savait pas encore grand-chose, était loin de leurs préoccupations.
Pendant cette période, les chercheurs, c’est vrai, ont tardé à observer que la majorité des cas les plus sévères nécessitait souvent une hospitalisation de longue durée qui mobilisait des lits et des appareils respiratoires en nombre limité.
Les opportunistes s’en donnent à cœur joie aujourd’hui : « Pourquoi a-t-on attendu la pandémie pour prendre des mesures drastiques qui permettaient de l’empêcher ? » Ben voyons ! Il faut une sacrée dose de mauvaise foi !
J’ai rappelé, dans un précédent article, que Le » Livre Blanc sur la défense et la sécurité nationale » de 2013, évoque le « risque de pandémie hautement pathogène et à forte létalité résultant, par exemple, de l’émergence d’un nouveau virus franchissant la barrière des espèces ou d’un virus échappé d’un laboratoire de confinement ». Dans un ouvrage intitulé “Le nouveau rapport de la CIA, comment sera le monde de demain“, Alexandre Adler décrivait, en 2005, sur la base d’un rapport de l’agence de renseignement américaine, comment le monde pourrait être bouleversé par la survenue d’une pandémie née en Chine et appelée Coronavirus. Ceux qui évoquaient ce risque n’étaient pas nombreux.
À suivre…
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