Le 25 décembre 2014, disparaissait Jacques Bouzerand


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Pour tous ceux qui l’ont connu et aimé, je termine l’année 2016, sur ce blog, en pensant à lui et à ses proches : Dany, sa sœur, Annette, sa femme, Marianne, sa fille et ses petits-enfants avec lesquels, Jacques avait passé ses dernières heures.

Je reproduis ci-dessous l’hommage que je lui ai rendu à la cathédrale de Cahors dans les premiers jours de janvier 2015.

jb

 

C’est pour moi un honneur bien cruel que celui d’avoir à célébrer sa mémoire.

Sa voix douce et chaude, l’odeur de sa pipe, ses éclats de rire, ne me quittent pas.

Le 25 décembre, Jacques Bouzerand nous a quittés.

Il n’était pas seulement le journaliste de talent, aimé et respecté par toute la profession, l’homme de télévision, qui participa à la création de la Cinquième qui deviendra la 5, le critique d’art contemporain capable de faire comprendre ce qui ne l’est pas à première vue, l’écrivain, qui publia sur l’art, sur l’éducation, un certain nombre d’ouvrages et d’articles dans diverses publications.

Jacques Bouzerand était aussi une grande figure lotoise comme l’a écrit fort justement la Dépêche.

Il était très attaché à Cahors, à l’histoire et à la géographie cette terre des merveilles qu’est le Quercy.

La réussite professionnelle, les relations avec les cercles de pouvoir, les honneurs, n’ont jamais modifié son comportement Humble, discret, attentionné, toujours amical, Jacques était resté fidèle à ses vingt ans, je devrais dire à l’enfant que les plus anciens ont connu.

Quand il rentrait du petit lycée Gambetta avec son ami Bernard Bonneville, son meilleur ami, ils étaient inséparables, ils rêvaient ensemble d’étoiles, de soucoupes volantes, de civilisations lointaines, de l’Afrique, de l’Asie…

Facétieux, il l’a toujours été, ils étaient capables, les jours de foire de poser un vieux chapeau arrimé à un fil de pêche, et de le tirer violemment lorsqu’un passant se baissait pour l’attraper.

Mais aussi sérieux, curieux, qualité première pour un futur journaliste, Jacques a eu très jeune une passion : l’archéologie. A Cahors, dès qu’un chantier s’ouvrait et que les ouvriers creusaient il se précipitait, avec son ami, pour être les premiers à fouiner. Ils ramenaient des tessons de poteries gallo-romaines qu’ils entreposaient dans une pièce du 55 bd Gambetta qu’ils appelaient le « Musée ».

Plus tard, perchés sur leurs vélos, ils escaladaient le Mont Saint-Cyr, où s’élevait, voilà plus de 2000 ans, un Temple gallo-romain, et les falaises de la région à la recherche de pointes de flèche en pierre taillée.

Jacques n’était pas sportif, le rugby, le foot, ne lui procuraient aucun plaisir. Ce qui l’intéressait, c’était l’histoire locale, la politique, le cinéma, la peinture surtout. Picasso Matisse, Lurçat… c’était quand même autre chose que les sports collectifs.

Avec Lazare, son petit-fils, le 24 décembre 2014
Avec Lazare, son petit-fils, le 24 décembre 2014

Vint le temps du Solex, sans doute une des plus heureuses de son existence, avec la naissance de la bande dont je me garderai bien de citer les noms des membres de peur d’en oublier, mais ils se reconnaitront. Certains nous ont déjà quittés. C’était l’époque des surboums, des fêtes, chez les uns, chez les autres, des fêtes de village et des vacances au Lavandou, au camping à La Favière…

Un peu plus âgé, j’observais, non sans une certaine admiration, la joie de vivre de cette bande promise à un bel avenir.

Ses études secondaires terminées, Jacques les a poursuivies à Paris, au lycée Henri-IV, en hypokhâgne et khâgne, puis à la Sorbonne en littératures française et allemande.

Un stage au journal Le Monde, dont il gardait un souvenir très fort, finit de le convaincre. Il avait trouvé sa vocation : être journaliste.

Licencié ès lettres modernes, docteur en sociologie, il décide de faire son service national dans la Coopération. Au Sénégal, pendant trois ans, il enseigne le français à l’Ecole nationale des cadres ruraux et prépare sa thèse sur « La presse à Dakar, sa diffusion, son public » qu’il soutient en 1967.

De retour en France en octobre 1967, Jacques Bouzerand entre à l’Aurore. Les questions d’éducation et les problèmes de l’université lui sont confiées à la veille de « Mai 68 ». Il écrit, en collaboration deux autres journalistes et l’AJU, deux ouvrages : « Votre enfant au collège et au lycée » et « Les Partis devant l’école ».

En 1972, il quitte L’Aurore pour participer à la création du Point où il est chargé des sujets de société et d’éducation. De 1976 à 1988, il est responsable des pages du Point Confidentiel et de politique intérieure en qualité de rédacteur en chef-adjoint

En 1986, nous avons suivi ensemble la 39e session de l’Institut des hautes études de la défense nationale (IHEDN)

Avec Jacques, en 1987, entre Vancouver et la Colombie Britannique
Avec Jacques, en 1987, entre Vancouver et la Colombie Britannique

En 1987, il prend en charge le secteur Culture-Civilisation (arts, livres, cinéma…)

En octobre 1992, Georges-Marc Benamou, directeur de la publication de l’hebdomadaire Globe-Hebdo propose à Jacques Bouzerand le poste de rédacteur en chef : un poste qui ne se refuse pas. L’expérience sera de courte durée.

En mars 1993, Michel Roussin, nommé ministre de la Coopération propose à Jacques de rejoindre son cabinet en qualité de conseiller technique.

En mai 1994, l’opportunité lui est offerte de participer, avec Jean-Marie Cavada, à la création de la Cinquième, dont il sera le directeur de la communication.

Quand La Cinquième devient France 5, et entre dans le groupe France-Télévision, Jacques Bouzerand conserve ses fonctions de directeur de la communication

A partir de 2002, Jacques, passionné d’art contemporain, se consacre à la création de documentaires pour la télévision et à l’écriture de livres et d’articles pour diverses publications sur ce sujet.

Jacques faisait remonter sa passion pour l’art contemporain à sa première interview, en 1957, à l’âge de 17 ans, d’Ossip Zadkine pour « L’éclectique », le journal de son lycée. En 1959-1960, à l’âge de vingt ans, avec ses camarades Bernard Bonneville, Bernard Pagès, Dominique Pujol, Dominique Blanc, il avait exposé ses peintures et dessins abstraits au musée de Cahors.

Devenu critique d’art contemporain, Jacques a écrit de nombreux articles sur l’art et les artistes Il a interviewés les plus grands, les plus connus. Pierre Soulages, César, Robert Combas, Didier Chamizo, Je ne peux les citer tous, j’en suis incapable et je risquerais d’en oublier, la liste est impressionnante.

Jacques Bouzerand est aussi l’auteur avec Thierry Spitzer, réalisateur, d’une série télévisée Place à l’Art contemporain !, six films de 52 minutes, diffusés en 2003-2004 sur France 5.

Il a notamment un ouvrage sur l’artiste français Yves Klein (1928-1962), Yves Klein, Au-delà du bleu,klein-au-dela-du-bleu

En 2013, Une « Carte blanche » lui avait été confiée par la Galerie Gimpel et Müller. Il avait organisé l’exposition de quatre artistes : Jean Rédoulès, André Nouyrit, Alain-Jacques Lévrier-Mussat, Denise Samson-Dissès.

Ces dernières années, Jacques animait des discussions sur plusieurs blogs spécialisés.

Jacques était connu pour son grand cœur. Naturellement bon, très attaché à la famille, loyal, son esprit, comme son humour, faisait l’admiration de ses proches.

Cultivé, élégant en toutes circonstances, mesuré, curieux et ouvert sur les autres, d’une rigueur professionnelle exceptionnelle, telles sont les qualités qui reviennent le plus souvent dans les innombrables messages qu’Annette, Marianne et Dany reçoivent.

« Ces femmes », comme il les appelait, l’ont accompagné jusqu’à son dernier souffle.

De temps en temps, je venais lui faire la gazette, par téléphone ou au pied de son lit. Je commentais l’actualité. Son visage s’animait, ses yeux pétillaient. Il oubliait un instant son état. Il y avait tout d’un coup en lui, un peu de Cyrano de Bergerac. Il reprenait ses combats contre l’hypocrisie, la pensée unique, le mensonge, les compromis, les préjugés, les lâchetés !….

Jacques était beaucoup plus qu’un beau-frère, c’était le frère que je n’ai pas eu.


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