Dans les commentaires et les vœux exprimés tout au long du mois de janvier pour expliquer l’inexplicable et tenter de tirer des leçons de l’épouvantable massacre de dix-sept personnes, les mots employés paraissent souvent bien usés, vides de sens. La transmission des valeurs, sans parler du langage, tout simplement, a lentement été abandonnée. J’ai consacré, sur ce sujet de la plus haute importance, plusieurs articles, ces derniers mois, à l’occasion de la publication de l’excellent essai de François-Xavier Bellamy : « Les déshérités ou l’urgence de transmettre ».
La complexité de la vie moderne, l’accumulation de problèmes lâchement poussés « sous le tapis » depuis trop longtemps, l’augmentation des besoins, la montée d’un individualisme inquiétant, des inégalités qui ne font que s’accroitre, le besoin irrépressible d’immédiateté, finissent par modifier profondément la vie quotidienne des Français et l’idée même du bonheur.
J’écrivais hier qu’il est urgent de restaurer notre modèle républicain, mais que la tâche est immense et demandera beaucoup de temps. Le « vivre ensemble », dont tout le monde parle, n’existe plus guère que dans nos villages où la vie est souvent dure, mais heureuse.
Sorges-en-Périgord, une commune que je connais particulièrement bien, est un bon exemple de ces villages français où il fait bon vivre « ensemble » dans l’esprit de Renan.
Sur le site de la commune : http://www.sorges-perigord.com/ le Maire, Jean-Jacques Ratier, rappelle que sa commune, « connue par les gastronomes du monde entier comme la capitale de la truffe noire, la fameuse « tuber melanosporum », est « le pays de la gourmandise ».
Les pèlerins qui se rendent à Compostelle, par la voie de Vézelay, s’arrêtent souvent à Sorges, où un gîte est ouvert de mai à octobre pour les y accueillir. L’église a fait récemment l’objet d’une restauration importante. Inscrite à l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques en juin 1967, l’Eglise Saint Germain d’Auxerre se caractérise par une architecture à la fois romane, gothique et renaissance, visible dès l’entrée. La brochure peut être consultée en cliquant sur http://www.sorges-perigord.com/files/Deplianteglise.pdf
On peut y découvrir que la nef est romane. La partie la plus ancienne de l’église est la coupole à pendentifs de l’avant chœur qui repose sur quatre piliers modifiés à l’époque classique. On accède au chœur, partie sacrée de l’église, en passant sous une voûte étoilée. Le chevet plat percé d’une meurtrière n’a pas eu de vocation défensive. La baie d’origine romane a été peu modifiée. Les baies de la nef ont été, quant à elles, percées plus tardivement. Les baies d’origine, visibles de l’extérieur, ont été obstruées. La nef garde les traces des diverses évolutions. Le mur de gauche permet de visualiser la forme des arcs d’origine surélevés par rapport à ceux d’aujourd’hui. Le collatéral gothique a été construit au XVI ème siècle. Deux baies en gothique flamboyant éclairent le collatéral. Une troisième fut obstruée à l’emplacement des fonds baptismaux actuels.
Deux éléments anciens, peu fréquents, sont présents dans cette église: La litre funéraire. Cette bande noire, matérialise un droit seigneurial héréditaire. Peinte lors des funérailles du détenteur de la haute-justice, elle était ornée des blasons voire du portrait du défunt. Cette bande pouvait être remplacée par une bande d’étoffe noire. Les litres funéraires n’avaient qu’une durée limitée ce qui explique leur rareté. En 1968, au cours d’une campagne de restauration, cette litre funéraire ainsi que les blasons furent découverts sous une couche d’enduit.
Il existe aussi à Sorges, des cabanes en pierres sèches, des traces de présence gallo-romaine et barbare. Le patrimoine y est encore important : le château de Jaillac(15e/ 17e), des manoirs comme les Pautis (15/18e) – le Pavillon (17e avec sa chapelle 18e), le Parnet (17/18e) avec sa chapelle. Il existe également des maisons Renaissances, de nombreux cluzeaux, ainsi que des croix- puits à balancier. Des chemins de randonnée sont organisés pour découvrir ces sites intéressants.
Le 29 janvier dernier, comme point final à la rénovation de l’église, l’orgue, récemment installé, a fait retentir ses premiers sons, sous les doigts de M. Bruno Vincent. http://www.sorges-perigord.com/?les-amis-de-leglise-saint-germain,59
Chaque année, le dernier dimanche de janvier, Sorges reçoit, en majesté, pour la grande « Fête de la Truffe, de la trufficulture et du gras ».
Cette année, les samedi 24 et dimanche 25 janvier, se tenait la 27e fête de la truffe. Trufficulteurs, membres de confréries gourmandes en costumes, producteurs de gras, de fromages et de pâtisseries, maraichers et pépiniéristes, Sorgeais, Sorgeaises, touristes, se croisaient sur la place malgré la petite pluie froide qui tombait.
Je dois à mon ami, M. Michel Duvernois, le récit de ces journées. La salle était pleine de monde, le samedi matin, « pour les démonstrations culinaires de Pierre Corre, le célèbre chef de « l’Auberge de la truffe » qui présentait la cuisson de Saint Jacques à la royale, rosace de magret de canard à la royale, brouillade et omelette aux truffes. Son second, Laurent Gilbert présentait un bar façon Richardin (arête remplacée par des tranches de truffes) et Eric Dumand le pâtissier du même établissement a fait un caramel truffé délicieux selon l’avis de la cinquantaine de personnes présentes.
L’après-midi, pour le traditionnel concours de la meilleure omelette aux truffes, 14 candidats étaient engagés sur le thème : la présentation, l’assaisonnement, l’homogénéité, la cuisson et les qualités gustatives. C’est Bernadette Reysz qui remporta l’épreuve.
Le dimanche matin, malgré des conditions climatiques difficiles au lever du jour, 20 kg de truffes ont été proposés à la vente. Elles ont rapidement changé de mains. Les prix ont atteint entre 800 et 900 € le kg. Le concours de la plus grosse truffe du Périgord a été remporté par madame Renée Laborie de Brantôme avec une tuber mélanosporum de 652 grammes.
Enfin, en présence de nombreuses autorités, du Secrétaire général de la préfecture, du Sous- préfet, de Madame la députée, de plusieurs conseillers généraux, du Président de l’intercommunalité et de nombreux maires et élus, ainsi que de trois confréries locales, quatre nouveaux membres ont été nommés au docte collège de la truffe et du foie gras et ont prêté le rituel serment. La Sorgeoise, le traditionnel apéritif local a ensuite été offert avant le repas de midi pris dans une salle comble. Les Croquants d’Escornabiau, comme chaque année, ont assuré l’animation. Servir 360 omelettes en 45 minutes n’est pas une mince affaire. Les 25 Sorgeaises aux fourneaux ont fait preuve, une nouvelle fois, de leur talent légendaire.
Le Comité des Fêtes avait parfaitement organisé ces journées qui ont connu un grand succès. Son président, mon ami Alain Robert, est un grand professionnel, connu dans toute la région, pour ses grandes qualités humaines, mais aussi pour la variété, l’originalité et la qualité des manifestations qu’il organise. La célébration du centenaire de la publication du « Manuel de trufficulture » du docteur Louis Pradel, mon arrière-grand-père, en a été le dernier exemple. L’exposition, dans la Galerie Louis Pradel, a connu un vif succès.
« La Radio du Goût », comme « Radio France bleue Périgord » ont couvert l’événement avec leur fidélité habituelle. Enfin, je remercie Michel Duvernois et Alain Robert, pour leur aide et les photos qu’ils ont mises en ligne sur Facebook et qu’ils ont bien voulu m’autoriser à mettre sur ce blog.
Renan disait juste : « Les nations sont le souvenir des actions passées, les joies du présent et l’espérance de vivre ensemble dans l’avenir. » Les villages de France en sont l’illustration.
Laisser un commentaire