En Syrie, c’est donc bien une partie d’échec qui se jouait. Et, à ce jeu là, le « Cher Vladimir » s’est – au moins provisoirement – montré le meilleur. Il jouait pourtant avec les noirs qui avaient un coup de retard. Et en plus, avec le mauvais rôle, celui du méchant qui bloque la partie. C’est, en tout cas, ce que l’opinion a observé et ressenti. Partie d’échec, car le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, a découvert son Roi, le 9 septembre, quand il a déclaré que « Damas ne pourrait éviter les frappes qu’en renonçant à son arsenal chimique… » « D’accord » ! Le « Tsar » a immédiatement mis les Etats-Unis « échec et mat » en proposant la mise sous contrôle et la destruction de l’arsenal chimique syrien que Bachar al-Assad ne pouvait refuser. La partie était provisoirement terminée. Provisoirement, car un proverbe arabe dit « qu’il faut toujours ramener le menteur devant le pas de sa porte ». Une nouvelle partie a commencé. Les pièces ont été replacées sur l’échiquier. De nouvelles combinaisons, de nouvelles options, sont envisageables. Vladimir Poutine aura-t-il tendance à abuser de sa victoire ? S’il persiste à soutenir systématiquement les dictatures, il lui sera difficile d’affirmer, comme il vient de le faire, que la Russie est « indispensable » à l’ordre mondial. Ne vient-il pas de faire le plus facile ?
Profitant de la tenue à New-York de l’Assemblée générale des Nations-Unies, le nouveau président iranien s’est habilement invité dans la partie. Sous son air bonhomme, dans sa tenue traditionnelle, turban blanc et aba noir, Hassan Rohani pourrait bien se révéler, lui aussi, un redoutable joueur, fin, subtil, comme sont capables de l’être les Iraniens. En l’espace de quelques jours, ceux qui empêchaient toute solution politique, qui soutenaient un régime en train de commettre ouvertement des crimes contre l’humanité, qui avaient une position insoutenable, ont restauré leur image et réussi l’exploit d’apparaître comme seuls capables d’apporter une solution qui ne soit pas militaire. L’opinion publique mondiale ne supporte plus les exactions commises dans les pays totalitaires, mais ils ne supportent plus, non plus, les « frappes chirurgicales » punitives qui ne résolvent aucun problème. Dans la nouvelle partie qui commence, les présidents Obama et Hollande ne débutent plus avec les blancs. Leurs discours sur le thème : « C’est grâce à notre détermination et à notre menace, que les Russes ont changé d’attitude », ne parviennent pas à modifier le ressenti de l’opinion. Une opinion publique qui ne comprend pas comment on peut soutenir un mouvement de résistance – en partie djihadiste – en Syrie, alors que nous combattons leurs « frères » au Mali.
Le triste « printemps arabe », un printemps pourri, est passé par là. L’Orient est très compliqué. Peut-on, pour autant, quitter la partie, se désintéresser de se qui s’y passe, se contenter d’une politique étrangère à « l’allemande » ? Ce n’est pas si simple quand il s’agit de la France qui aspire à avoir une influence, sinon une puissance.
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