A trois semaines de l’ouverture de ses JO, le président russe s’efforce, sous la pression occidentale, de rassurer. « Les gens ont différentes orientations sexuelles. Nous accueillerons tous les sportifs et tous les visiteurs des jeux Olympiques », a-t-il déclaré à plusieurs chaînes de télévision. Il faut dire que la récente loi, qui interdit la « propagande » homosexuelle devant mineurs, sous peine de prison, a troublé les esprits et provoqué des appels au boycott susceptibles de gâcher la fête. Le président russe s’explique : « les gens ayant cette orientation non-traditionnelle qui ont l’intention de venir soit en tant qu’invité soit en tant que participant aux JO, n’ont aucune crainte à avoir ». Il minimise la décision de certains chefs d’Etat et de gouvernement de ne pas se rendre à Sotchi pour la cérémonie d’ouverture. « Certains chefs d’Etat et de gouvernement n’ont absolument pas l’habitude d’aller à l’inauguration (des JO) », a-t-il déclaré dans le même entretien télévisé. C’est exact. « Les jeux Olympiques ne sont pas une compétition d’hommes politiques », a-t-il précisé avec humour.
Il y a quelques jours, mon ami Joël Bouzou, président de « Peace and Sport », publiait, dans le journal « Le Monde » du 10 janvier, sous le titre « Il faut aller aux Jeux d’hiver de Sotchi. Le boycott est néfaste » une tribune dans laquelle il expliquait que « Cette question ne devrait pas être posée. Par son rayonnement auprès de la jeunesse du monde entier, par les valeurs de solidarité, d’échange et d’ouverture que véhicule l’idéal des Jeux, l’événement olympique doit d’être protégé. Et l’idée même de le bouder ne devrait pas être évoquée. » Dans cet article, Joël Bouzou rappelle que « les deux derniers présidents français qui ont assisté à une cérémonie d’ouverture des Jeux d’hiver l’ont fait à domicile, à Grenoble en 1968 pour le général de Gaulle, à Albertville en 1992 pour François Mitterrand. Les autres n’ont pas fait le voyage.
Ancien champion du monde de pentathlon moderne, plusieurs fois médaillés aux Jeux Olympiques, Joël Bouzou soutient, à juste titre, que « le sport est devenu un formidable outil diplomatique. J’ai la conviction que les grands événements sportifs internationaux peuvent aujourd’hui servir de plate-forme pour transmettre des messages, favoriser le dialogue, et même, parfois, faire avancer les idées de progrès et d’ouverture. »
Je partage son point de vue.
Cela étant, le contexte international s’impose et les comptes se règlent. Les positions prises par M. Poutine en 2013 ne sont pas oubliées. Ce n’est pas sans raison que le président Barack Obama vient d’annoncer qu’une militante de la cause homosexuelle, l’ancienne championne de tennis Billie Jean King, ferait partie de la délégation officielle américaine, mais qu’aucun membre de son entourage ne fera le déplacement, alors que le vice-président Joe Biden avait représenté les Etats-Unis à Vancouver en 2010.
Il faut se souvenir de ce qui s’était passé en 1980, à Moscou, pour les Jeux de la XXIIe Olympiade de l’ère moderne. Peu de temps après l’invasion de l’Afghanistan par l’Union Soviétique (1979), une cinquantaine de nations, dont les Etats-Unis d’Amérique, avaient boycotté purement et simplement les Jeux. C’était la guerre froide. Il y avait même eu un ultimatum de Jimmy Carter suivi d’interminables négociations qui n’aboutirent qu’à la marge. Le Canada, le Japon, La Corée du Sud, l’Allemagne de l’Ouest, suivirent les Etats-Unis qui ne cédèrent pas. La France laissa son comité olympique, le CNOSF, décider et, à l’exception de trois fédérations (équitation, voile et tir) participa aux Jeux et défilèrent, lors de la cérémonie d’ouverture, derrière la bannière olympique et non derrière le drapeau français comme le firent plusieurs autres nations.
Nous ne sommes plus en 1980. Ce n’est plus la guerre froide, même si, parfois, certains commentateurs se hasardent à ressortir ce terme quand le président russe force un peu son talent.
Toujours est-il que, dans trois semaines, c’est la ministre des sports, Valérie Fourneyron, qui représentera la France le 7 février à Sotchi. Le président de la République a précisé que la ministre s’y rendrait car c’est l’usage pour les jeux Olympiques, et qu’il n’y a pas à rechercher d’autres messages que celui-là », a rendu compte Mme Vallaud-Belkacem après le dernier Conseil des ministres.
La ministre tient d’ailleurs à peu de choses près le même discours que Joël Bouzou et c’est très bien ainsi.
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