« Citius, altius, fortius »


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Le baron Pierre de Coubertin, fondateur des Jeux olympiques de l’ère moderne, ami du Père dominicain, Henri Didon, directeur de l’internat Albert-le-Grand, à Arcueil, auteur de la formule : « Plus vite, plus haut, plus fort… Vers le Christ », s’appropria le mot d’ordre et s’empressa de débarrasser la devise de son sens religieux pour en faire la maxime olympique universellement connue.

L’idée d’organiser les premiers Jeux olympiques de l’ère moderne, à Paris, en 1900, dans le cadre de l’Exposition universelle, fut émise dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne, en 1884. C’était trop loin. À la demande de la Grèce, les premiers Jeux se déroulèrent donc à Athènes en 1896. Les Jeux suivants eurent lieu à Paris, en 1900, dans une pagaille indescriptible. Les critiques furent vives et le sujet si sensible que le président de la République, Alexandre Millerand, fit à peine allusion aux Jeux olympiques, qui venaient de se dérouler, dans son discours de clôture de l’Exposition universelle.

le village olympique en 1924

Pierre de Coubertin voulait que les Jeux olympiques soient « débarrassés de toute ingérence politique ». La règle 50.2 de la Charte Olympique stipule qu’« aucune sorte de démonstration ou de propagande politique, religieuse ou raciale n’est autorisée dans un lieu, site ou autre emplacement olympique ». C’est beaucoup demander. De nombreux athlètes s’agenouillèrent en soutien au mouvement Black Lives Matter pour obtenir plus de justice raciale, comme Tommie Smith et John Carlos, aux Jeux olympiques de Mexico en 1968, qui avaient levé le poing en hommage à la lutte des Africains Américains contre le racisme aux États-Unis. Les deux athlètes avaient été exclus à vie des Jeux olympiques mais ils font partie de l’histoire des Jeux comme l’Éthiopien Feyisa Lilesa, qui, à Rio, en 2016, avait franchi la ligne d’arrivée du marathon, les poignets croisés au-dessus de la tête, en signe de protestation contre la politique menée par le gouvernement éthiopien à l’encontre des Oromos, une ethnie de son pays.

Le baron fondateur ne se faisait probablement pas beaucoup d’illusions sur ce que deviendrait l’esprit olympique. Ce n’était pas réaliste. L’amateurisme n’a jamais été qu’une utopie, une « vieille et stupide histoire ». Il y a longtemps que l’essentiel n’est plus de participer mais de disputer, à tout prix, une « course aux médailles » frénétique et passionnée. Frénétique, parce que certains pays « fabriquent » leurs athlètes comme le faisait, en son temps, l’Union soviétique. Passionné, parce que tous les moyens sont bons pour obtenir un maximum de médailles, au nom d’une certaine idée du nationalisme.

L’olympisme demeure cependant une philosophie. L’esprit olympique, même un peu cabossé, existe encore. Les athlètes y sont très attachés. Toutes les grandes villes veulent un jour ou l’autre, organiser les Jeux, malgré les risques financiers que cette ambition fait courir.

Des esprits chagrins, insensibles aux valeurs du sport et aux émotions que suscitent les compétitions, instruisent, tous les quatre ans, le procès des Jeux. Ruineux, tout juste bons à attiser les nationalismes, les Jeux ne seraient que « la forme exacerbée et mondialisée du triomphe de la société du spectacle ». Le panem et circenses (pain et jeux du cirque) des Romains, servirait toujours à étouffer la révolte des populations exploitées. Le principe même de la compétition est jugé cruel et décadent par ces « beaux esprits » qui n’hésitent pas à l’ériger en idéologie pour mieux la dénoncer. Ils auront bien du mal à gâcher le plaisir d’une très grande partie de l’humanité qui, le temps des Jeux, a besoin d’oublier les soucis, de respirer et d’admirer les exploits des sportifs de très haut niveau.

Dans L'Equipe de ce jour

Les valeurs du sport seraient-elles un mythe ? Vecteur d’éducation et d’éveil à la citoyenneté pour certains, vecteurs des valeurs dominantes de notre époque, la compétition, la recherche de la performance, l’individualisme, les objectifs économiques ou politiques ne seraient, pour les autres, que des perversités du sport. Où se situe la vérité ? En réalité, le sport n’a pas de valeurs spécifiques, les valeurs dont il s’agit, sont communes à la famille, à l’école ou à l’entreprise. Le dépassement de soi, l’esprit d’équipe, la performance individuelle, le goût de l’effort, ne caractérisent pas seulement le sport. Ils doivent s’accompagner des valeurs universelles que sont : l’honnêteté, la modestie, le courage, la tolérance, l’honneur. Force est de constater, malheureusement, que le racisme, le dopage, le nationalisme, la corruption, la tricherie, sont trop souvent l’autre face de la médaille.

Les Jeux sont ce qu’ils sont, une grande et belle fête du sport. Pour le reste, il ne faut pas être trop exigeant !

Le 21 juillet 2021, le président du Comité international olympique (CIO), Thomas Bach, a annoncé que la devise « Plus vite, plus haut, plus fort » avait été modifiée pour inclure le mot « Ensemble », dans un souci de solidarité. « Nous devons adapter la devise à notre époque », avait-il déclaré.

La France n’est plus la grande puissance qu’elle était en 1900, mais, pendant la durée des Jeux, toute la planète regardera la France et Paris, en particulier. Emmanuel Macron a pris le risque d’appeler, sans grandes illusions sans doute, à une trêve olympique. C’est classique, mais osé ! Historiquement, les Jeux olympiques n’ont jamais modifié le déroulement des guerres.

Demain, presque tous les Grands de ce monde seront présents, ou représentés, à l’exception du président Vladimir Poutine, son pays, la Russie étant sous sanctions occidentales.

Formons le vœu que tout se passe bien et que ces Jeux constituent une pause qui facilite le rapprochement des peuples et la paix dans le monde.


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