Ce qui arrive était écrit. Les actionnaires, qui exigent une rentabilité des fonds propres à hauteur de 15% par an, sont des aventuriers. La sophistication des produits financiers, poussée à l’extrême et sans aucun contrôle, ne pouvait conduire qu’à la catastrophe. Il ne faisait pas bon jouer les Cassandre à ce sujet, il y a encore quelques mois.
Ce qui arrive était écrit. J’ai retrouvé dans mes billets, celui que j’avais écrit le 19 décembre 2005. Il n’est pas inintéressant de le remettre en ligne aujourd’hui :
« Je ne sais pas si Jacques Chirac a vraiment exprimé cette conviction devant des proches, comme le rapporte Catherine Pégard dans LE POINT du 8 décembre dernier, mais je pense que ceux qui ironisent sur ce propos feraient bien de réfléchir à deux fois. Le libéralisme, poussé à l’extrême par certains, produit des dégâts que la communauté internationale ne parvient pas à réguler. L’économie financière fait beaucoup de mal à l’économie réelle. La pression des actionnaires pour dégager des bénéfices importants à court terme devient insupportable. Les outils dérivés sont devenus une bombe à retardement. On vient de voir à Hong Kong et à Bruxelles à quel point les opinions publiques ont exercé une pression sur leurs représentants pour faire prévaloir des intérêts nationaux et finalement aboutir à des compromis qui sont également des bombes à retardement. Le nouvel ordre mondial n’est pas la Coupe du Monde de football. Le libéralisme, c’est à dire la liberté de faire à peu près ce qu’on veut sur le plan économique, accentue en permanence les écarts de revenus entre les riches et les pauvres, entre le Nord et le Sud. Le Président de la République, malgré tous les reproches qu’il est de bon ton de lui faire actuellement, est mieux placé de quiconque en France pour constater la montée les périls. De Sommets en Sommets, de G7 en G8, de Conseils européens en Conseils européens, il défend les intérêts de la France dans une compétition qui pourrait un jour mal se terminer. Lionel Stoleru avait, il y a une dizaine d’années, écrit dans le Monde un papier dans lequel il expliquait, en d’autres termes, que la révolution industrielle avait créé les conditions du marxisme et qu’il ne faudrait pas s’étonner si, un jour, le libéralisme trouvait sur son chemin un important mouvement mondial de contestation. Ceux qui rétorquent qu’on a pas trouvé mieux que la liberté pour créer des richesses et qui balayent les objections d’un revers de main, sont très optimistes. Ceux qui pensent que le libéralisme, que nous connaissons actuellement, est là pour 1000 ans sont inconscients. Jacques Chirac a probablement raison de dire, à sa façon, que le libéralisme n’est sans doute pas la fin de l’Histoire économique. »
Comme l’écrivait Edgar Faure : « Avoir toujours raison…c’est un grand tort. »
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