Ils arrivent, ils sont là !
Qui ?
Les gardiens de but allemands, qui font des « sorties » plus provocatrices, spectaculaires et … hasardeuses, les unes que les autres.
Tout le monde se souvient qu’en 1982, à Séville, en demi-finales de la Coupe du monde, le gardien de but allemand, Harald Schumacher, s’était jeté, les pieds en avant, sur Patrick Battiston. Le joueur français avait perdu connaissance avec un traumatisme crânien, deux dents en moins et une mâchoire fracturée.
Harald Schumacher regrette-t-il son geste, de triste mémoire ? Non, répondait-il, il y a quelques jours sur RTL, « Je ne vois pas de quoi je devrais me sentir coupable. Si Patrick Battiston se présentait devant moi aujourd’hui je ferais la même chose. Je sortirais pour prendre la balle et je toucherais une nouvelle fois Patrick, malheureusement. Mon erreur a été de ne pas m’occuper de lui après le choc. Je me suis excusé et il a accepté mes excuses. »
Oliver Kahn, son illustre successeur dans les buts de la Nationalmannschaft, de 1993 à 2006, vient de déclarer avec la même morgue, le même dédain, au risque de réveiller le volcan qu’on croyait éteint…. » La France n’est pas une grande équipe « . Provocation, volonté de déstabiliser les joueurs français ? L’homme est un spécialiste des « sorties », au double sens du terme, qui affaiblissent, attendrissent, l’adversaire. Il ne faut surtout pas que l’antagonisme historique disparaisse. C’est une source de motivation. Le suspens, le spectacle, sont à ce prix
Le sélectionneur français, Didier Deschamps, tente de calmer les esprits. « Il ne faut pas parler de revanche. C’était il y a plus de trente ans. Mes joueurs n’étaient pas nés. »
Oliver Kahn en remet une couche : «La France n’est pas une grande équipe, elle est loin d’être au-dessus du lot». On a vu beaucoup de faiblesses chez les Français contre le Nigeria. Lorsqu’on les presse tôt au milieu de terrain, ils n’arrivent pas à trouver Benzema. Il ne leur reste que peu de possibilités. Quant à la défense, elle n’est pas sûre du tout.»
Avec de telles déclarations, on ne pourra pas dire que ce sont les Français qui réveillent les vieilles rancunes. C’est de bonne guerre avant un quart de finale qui s’annonce épique.
Dans le même temps, les sorties de Manuel Neuer, l’actuel gardien de but de la Mannschaft, rappellent des souvenirs. Ce ne sont pas les mêmes sorties. Gardien de grand talent, impressionnant dans sa lecture du jeu, très fort sur sa ligne, Manuel Neuer est considéré, à juste titre, comme un des meilleurs gardiens du monde, peut-être même le meilleur. Ses interventions loin de ses buts, pour couper les trajectoires, comme un défenseur central, donnent de lui une image de « tête-brûlé » prêt à prendre tous les risques pour que ses buts restent inviolés.
A dix-neuf reprises, il a quitté ses buts pour effectuer des interventions déterminantes qui font de lui un onzième joueur de champ. C’est un gardien de but post moderne qui réinvente le rôle du gardien en excellant également dans le jeu au pied. Manuel Neuer, contre l’Algérie, a fait plus de tacles que d’arrêts avec les mains. Pendant cette rencontre, il a touché 59 ballons dont 21 en dehors de sa surface. C’est une statistique aussi exceptionnelle que rare.
Hugo Lloris, le gardien de but de l’équipe de France, avec son physique d’ascète, est beaucoup plus discret, sobre, classique. Il n’en est pas moins efficace. Ces deux gardiens, qui ont le même âge, se sont souvent rencontrés, ont beaucoup de respect l’un pour l’autre.
Est-ce que vendredi, un joueur français aura le cran, la lucidité, malgré la pression du milieu de terrain allemand, de tenter un lob qui ferait passer l’envie à Manuel Neuer de sortir aussi loin de ses buts et calmerait l’intrépidité, mais aussi « l’arrogance » – et le talent – des gardiens de but allemand. Si les joueurs allemands sont malades, comme la rumeur le colporte, c’est possible. La fièvre troublera leur jugement, leur lecture du jeu…
Réponse dans quelques heures au stade Maracana, à Rio, en quarts de finale de la Coupe du monde.
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